Société

L’art d’être bon

Entrevue avec Stefan Einhorn

Son livre L’art d’être bon (The Art of Being Kind), paru en 2008, a été un véritable succès dans le monde entier. L’auteur suédois Stefan Einhorn, qui est aussi cancérologue, part du principe que la gentillesse devrait faire partie de notre vie, car elle apporte non seulement le bonheur, mais aussi le succès dans la vie quotidienne.

Pourquoi la gentillesse a-t-elle si mauvaise réputation ?

La gentillesse est reliée aux enfants. On rappelle sans cesse aux enfants d’être gentils avec leurs frères et sœurs et avec les autres, et c’est une des raisons pour laquelle on associe la bonté à quelque chose de très puéril et d’enfantin. Être gentil, c’est être naïf, croire un peu tout et n’importe quoi. On peut presque dire que c’est être stupide, parfois, mais il est temps de changer cette façon de concevoir la gentillesse.

La gentillesse est, selon vous, un des secrets de la réussite et du succès ?

Oui, la vraie gentillesse est une grande qualité et elle mène au succès. Vous savez, tous les jours, on rencontre beaucoup de gens, que ce soit dans les transports en commun, dans la rue, au bureau, au restaurant. La façon dont on se comporte avec nos semblables peut changer notre vie. Quand vous êtes bon avec une personne, elle va se souvenir de vous, vous appréciera et voudra être gentille avec vous en retour. De cette façon, on crée un sentiment de gentillesse autour de soi qui est essentiel. Quand vous faites de bonnes actions pour les autres, les chances augmentent que les autres fassent de bonnes choses pour vous. Quand vous traitez bien vos employés, que vous vous souciez de leur bien-être et que vous les appréciez, toutes les études prouvent qu’ils sont plus heureux et donc plus productifs. Quand vous aidez quelqu’un dans la rue, non seulement vous en tirez de la satisfaction, mais la personne que vous aidez aussi est heureuse. La gentillesse, tout le monde y gagne, c’est ce que j’ai voulu prouver avec mon livre, soyez gentils et faites de bonnes actions ! La bonté est une grande spirale vertueuse, on ne le dit pas assez.

Quand on est gentil, notre cerveau active une zone de plaisir ?

Des études ont démontré que, si vous êtes généreux et que vous collaborez avec vos semblables, vous activez la zone de plaisir dans votre cerveau, la même que celle qui est activée par la nourriture qu’on apprécie et par le sexe, ce qui prouve qu’on a un réel plaisir en réalisant de bons gestes.

Sommes-nous naturellement bons et gentils ?

Personne n’est 100 % bon, nous avons tous un côté plus sombre en nous. Oui, il y a des gens qui sont foncièrement bienveillants et gentils. Je pense qu’on est naturellement bon, mais on peut l’être encore plus. Je pense que l’être humain est composé de 95 % de bonnes choses et a 5 % de diable en lui ! Mais il peut s’entraîner à être plus gentil, c’est si facile et surtout, on y gagne à tous les coups.

Vous êtes professeur d’oncologie en Suède. Il est important pour les médecins d’être gentils ?

Oui, évidemment. J’apprends aux médecins à être de meilleurs médecins. Je leur inculque l’importance de bien parler aux patients, de bien en prendre soin, d’avoir une approche plus humaine, d’être gentils et d’avoir de l’empathie. Ce n’est pas toujours naturel chez certains d’entre eux, vous savez. Je leur dis souvent que de toutes petites choses font de grandes différences, ne serait-ce que dans le ton de la voix, le regard, la gestuelle.

Faut-il parfois mentir pour être gentil ?

Que pensez-vous de ma veste ? Elle est belle ! Même si vous ne le pensez pas, soyez gentil et dites à votre ami que vous l’aimez. On peut enfreindre légèrement nos principes très stricts en mentant un peu parce que ça va faire du bien à l’autre personne. Pourquoi dire la vérité alors que, de toute façon, on ment deux ou trois fois par jour sur de petites choses du quotidien ? On peut mentir pour faire du bien.

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